5 336 2

Jean Albert Richard


Premium (World), Runkel

Photo-souvenir...

... d'un retour de Provence par la route d'hiver des Alpes. Après avoir quitté la Provence au soir du lundi de Pâques 1965, par une température avoisinant les 20° C, j'ai remonté la vallée de l'Eygues, et vers 22 heures 30, les choses ont rapidement changé. Il a commencé à neiger et tout était déjà bien blanc quand je suis arrivé à Serres. J'ai continué jusqu'à Aspres-sur-Buech, où je me suis mis à l'abri dans une épave de voiture pour manger un peu et fermer les yeux quelques dizaines de minutes. Je suis reparti à l'assaut du col de la Croix-Haute, où la photo a été prise: plus rien n'avançait, et j'ai dû mettre pied à terre au sommet: j'avais remarqué que mes freins ne répondaient plus, l'huile ayant figé dans la gaine des câbles, et surtout parce que de la glace s'était déposée au passage des roues dans la fourche et entre les haubans à l'arrière. Tant qu'on monte, ce n'est pas absolument un problème, mais il aurait été insensé d'entreprendre la descente sur Grenoble dans de telles conditions.
Je suis entré dans la gare de Lus-la-Croix-Haute, proche du sommet du col, et j'ai attendu le premier autorail du matin.
J'ai poursuivi mon périple à partir de Grenoble, où il avait neigé aussi, mais en plaine, c'était beaucoup moins grave et dans l'intervalle, les routes avaient été dégagées. La glace qui paralysait mes freins avait fondu dans la salle d'attente de Lus-la-Croix-Haute, ce qui m'avait valu d'être regardé de travers par le guichetier qui voyait la flaque d'eau s'agrandir toujours davantage sous ma bicyclette.
En début d'après-midi, je suis arrivé chez mes cousins à côté d'Aix-les-Bains, où j'étais attendu. J'y suis resté une journée avant de reprendre la route vers Paris. Il a encore neigé dans la nuit, dans la côte de La Rochepot, au passage du seuil de Bourgogne et l'affaire m'a coûté tellement de calories qu'en arrivant à Avallon à l'heure du petit déjeûner, j'ai commandé une omelette de douze oeufs dans un restaurant de routiers.
Je suis arrivé à Paris en fin d'après.midi.
Ce n'est pas resté une expérience isolée: il est bien connu que les cyclistes de fond sont de dangereux récidivistes...

Commentaire 2